Robert Denoël, éditeur-

Editions La Bourdonnais

 

Les Editions La Bourdonnais ne constituent pas une société séparée : elles font partie des activités multiples de la Librairie des Trois Magots et n’ont été inscrites au registre du Commerce de la Seine que le 29 septembre 1936, alors qu’elles publiaient depuis 1934.

On trouve de tout dans cette production : des romans populaires, des pièces de théâtre, des essais politiques, un roman libertin, un recueil de nus artistiques, et surtout, de la poésie. Au total, soixante-dix volumes sont parus à cette enseigne entre 1934 et 1939, signés par des auteurs que l’histoire littéraire n’a pas toujours retenus.

On peut penser que Denoël a créé cette maison pour y publier des ouvrages qu’il ne pouvait inscrire à son catalogue. C’est ce que me confirmait Auguste Picq qui précisait que la plupart des ouvrages étaient publiés aux frais des auteurs.

Un titre obtint un succès inattendu : Prélude charnel, roman galant dû à la plume d’un inconnu, atteignit 124 éditions soit, si l’annonce n’est pas trompeuse, quelque 62. 000 exemplaires.

Dans son Anthologie des lectures érotiques, Jean-Jacques Pauvert assure que « Denoël en fit des tirages plus ou moins clandestins qui atteignirent semble-t-il des chiffres fabuleux. Sous l'Occupation, un grossiste de Lyon m'affirma en avoir vendu à lui seul plus de cent mille exemplaires de 1934 à 1942. »

Réédité par différents éditeurs entre 1947 et 1970, il connut une vogue qui ne s’est jamais démentie. En 1975, un dénommé Robert Courau prétendit qu'il était l'auteur du livre et produisit un manuscrit pour le démontrer.

Cécile Denoël, qui paraît avoir perçu des droits d'auteur sur ce livre entre 1946 et 1970, répliqua que ce roman galant publié sous pseudonyme était de la plume de son mari, Robert Denoël, et perdit son procès.

Certes, Robert Courau n'avait publié, entre 1919 et 1962, que des ouvrages techniques consacrés à l'industrie, la fiscalité, les mines et le pétrole, mais rien n'interdit à un fonctionnaire de rédiger un ouvrage érotique.

Le 14 mars 1975, la 3e Chambre du Tribunal de Grande Instance de Paris donna raison à ses ayants droit. Dans cette affaire, Cécile Denoël était défendue par Françoise Rozelaar-Vigier, la fille d'Armand Rozelaar.

Le fait est que ce curieux procès initié tardivement par un anonyme mit un point final à la carrière française de Prélude charnel : Régine Deforges fut le dernier éditeur à en proposer, en 1970, une réédition à l'enseigne de L'Or du Temps, contre laquelle Cécile Denoël avait protesté et qui fut sans doute à l'origine de l'action en justice de Robert Courau.

 

   

                                                                                                           Bibliographie de la France,  1er juillet 1970

 

Je n'ai pas beaucoup d'informations sur le personnel des Editions La Bourdonnais mais, puisque les volumes publiés étaient mis en vente à la Librairie des Trois Magots, c’est son gérant, le poète suisse Aloys Bataillard [1906-1956], qui devait s’en charger, assisté par une vendeuse, puis par Pierre et Georges Heyman entre 1935 et 1939.

L'hebdomadaire algérois L'Africain annonça, dans son numéro du 27 mai 1934, une « Anthologie des poètes d'expression française que prépare actuellement Monsieur A. J. Bataillard, directeur des Editions La Bourdonnais», qui ne vit pas le jour.

Il n'est pas sans intérêt de relever que Denoël, qui avait la réputation de ne jamais « déléguer », avait permis à Bataillard de créer et de domicilier, en juin 1939, une « Société des Amis de C.-A. Cingria » avenue de La Bourdonnais, afin d'y publier un de ses ouvrages [voir Enseignes diverses].

En 1940 Aloys Bataillard est rentré en Suisse, et la gérance des Trois Magots a été confiée à Jean Moreau. Les Editions La Bourdonnais, déficitaires, n'ont plus rien publié durant l'occupation.

Les volumes édités par les Editions La Bourdonnais n’étaient pas annoncés dans les organes de presse habituels où Denoël publiait les « Vient de paraître » de sa maison d'édition mais essentiellement - et pas systématiquement - dans la Bibliographie de la France. Aloys Bataillard eut la bonne idée de faire le service de ses publications à des journaux suisses comme le Journal de Genève ou la Gazette de Lausanne, ce qui a permis d'en identifier plusieurs.

 

1934

 


Adda (Maxime). Ali chez les aryens [n° 643]
Debouté (Alexandre). Miss Alycanthe [n° 644]
Gaumerais (Jean). La Nature te sauvera ! [n° 720]
Lami (André). En vase clos [n° 645]
La Noë (François de). Célestin Courtebise ou la conquête du pouvoir [n° 646]
Mercier (Henry). Un Secret d’état sous Louis XIV et Louis XV [n° 647]
Perrey (Louis). Jean-Paul Silène [n° 648]
Sermaise (Robert). Prélude charnel [n° 649 ]

 

1935

 


Amice (Paul). Raca ! (Chronique de la maison des fous) [n° 650]
Album de l'Année poétique [n° 690]
Badin (Jules) et Jean Tallez. Joffre le Catalan ou le maréchal en espadrilles [n° 651]
Carles (Jean-Louis). Eléonore, maîtresse femme [887]
Chassagne (Jean). A l'Ante [n° 930]
Choisy (Laure). L’Oiseau vert ou Jean, Jeannette et Jeannot [n° 837]
Deprez (André). Les Pas vers l’abîme [n° 652]
Dupin (Raymond-Paul). Le Chemin du ciel [n° 888]
Lami (André). Béatrice ou la lueur dans la tourmente [n° 654]
Spitalier (Jean). Force et justice [n° 655]
Venel (Vicomte Henri de). Notre première garnison [n° 653]

 

1936


Amachantoux. La Feuillée éparse [n° 656]
Créhange (Dr Pierre-André). Adda ou l’Aventure marocaine [n° 657]
Duron (Jacques). Langue française, langue humaine [n° 658]
Frenkel (N.) La Grande aventure [n° 890]
Gaillard-Forget (Suzanne). Chansons [n° 770]
Gassert (Dr Karl Georg). Allemagne, bête noire de l’Europe [n° 659]
Halda (Bernard). Points cardinaux [n° 660]
Pallière (Aimé). Le Voile soulevé [n° 667]
Valat (Etienne). Ce que femme veut... [n° 661]


1937

 


Agadjanian (Georges) et Serge Strauss. La Volonté de Julien Rives [n° 662]
Bijl (K.J.) Billy Clochard [n° 892]
Chassagne (Jean). Exorde poétique [n° 932]
Delaume (Georges). Charniers [n° 973]
Delval (Lionel). La Dernière expérience [n° 891]
Fervan (Jean). La Fin des temps [n° 664]
Hauteclocque (François de). Grandeur et décadence des Croix de Feu [n° 663]
Labraux (Marcel). Feuilles au vent [n° 889]
Laurain (Adolphe). Au crépuscule du monde [n° 972]
Le Livre des charmes [n° 665]
Mayer (Elisabeth-A.) Vers les mystérieuses Hébrides [n° 723]
Valentin (F.A.) L'Amour s'éveille [n° 924]

 

1938


Baraude (Henri). Mademoiselle Mentor [n° 999]
Beuchat (Charles). Jeunesse ardente [n° 668]
Boulay (François). Victime du célibat [n° 680]
Chassagne (Jean). Au seuil de l'arène [n° 931]
Delaume (Georges). Le Brasier [n° 938]
Derville (Annie). Les Cahiers de Marise. Un paradis perdu. A l’ombre d’une basilique [n° 669]
Didier (Antoine). Patte pelue [n° 670]
Ernault (Georges). Les « Hors Série » [n° 666]
Géraldine. Une Amazone : Catherine Ségurane [n° 672]
Géraldine. Le Faune [n° 673]
Hudry (Marthe). Chien d’Occident [n° 674]
Hudry (Marthe). Le Chien volé [n° 691]
L’Arverne (Jean). En ces temps d’apocalypse [n° 675]
Lambert (Edmée). La Petite Dame pas verte et pas mûre [n° 689]
Leclercq (J.F. Paul). Reflets [n° 683]
Massenet (Andrée). Les Voix pures [n° 758]
Mercier (Henry). Une Vie d'ambassadeur du Roi Soleil [n° 685]
Michaux (Louis). Les Disques incolores [n° 1000]
Pautrat (Maxime). Glèbe [n° 686]
Rousseau (Roger). Le Livre de Riquet [n° 676]
Seyse (Serge). Le Cahier d’heures [n° 677]
Vallis (Géo) et Franz d’Hurigny. Viens, nous rêverons... [n° 678]

 

1939

 


Beuchat (Charles). De Restif à Flaubert ou le naturalisme en marche [n° 679]
Brellmann (Charles). Place aux jeunes... Appel aux femmes [n° 1001]
Descola (Jean). Les Velléitaires [n° 937]
Furst (Henry). Simoun [n° 681]
Géraldine. Aperceptions [n° 688]
Leclercq (J.F.P.) L’Un-Trois [n° 682]
Mathieu (A.-C.) Non ! Ce n’est pas Franco qui a commencé [n° 684]
Zumthor (Paul). Le Feu sur la moisson [n° 687]

 

Aloys Bataillard et une vendeuse devant la librairie de l'avenue de La Bourdonnais