Robert Denoël, éditeur

Les Éditions Documentaires Nationales

 

Cette maison d'édition domiciliée au 19 rue Amélie paraît n'avoir eu aucune existence légale et n'a servi que deux fois : en 1939 et en 1940.

Elle figure sur deux brochures parues dans la collection « Les grandes figures d’aujourd’hui » consacrées au général Gamelin et au cardinal Verdier.

Leur aspect typographique les apparente à la collection « Célébrités d’hier et d’aujourd’hui » publiée entre 1935 et 1937 par Denoël et Steele mais leur contenu les relie plutôt à la revue Notre Combat publiée par Robert Denoël entre septembre 1939 et mai 1940. Comme cette dernière revue, elles sont imprimées par La Technique du Livre, 29 bis rue du Moulin-Vert, à Paris XIVe.

Pourquoi Denoël crée-t-il cette maison d'édition éphémère, je l'ignore, mais si l'on examine sa production durant la « drôle de guerre », on s'aperçoit qu'il a multiplié les adresses, les collections et les enseignes.

Au début de 1940 il écrit à sa femme : « A côté de " Notre Combat " j'ai publié deux brochures, un Gamelin et un Ct Verdun, une brochure sur les atrocités allemandes en Pologne et un livre intitulé Une Finlandaise dans la tourmente que tu as dû recevoir ces jours-ci. »

Les ouvrages évoqués sont :

* Notre Combat, revue hebdomadaire dirigée par Robert Denoël, 19 rue Amélie, mais domiciliée à l'origine au 60 avenue de La Bourdonnais.

* Gamelin par Maurice Percheron, premier titre de la collection « Les grandes figures d’aujourd’hui », une brochure de 48 pages publiées en 1939 par les Editions Documentaires, 19 rue Amélie [la couverture porte : Editions Documentaires Nationales].

* Face à l'ennemi, une collection « patriotique » dont deux volumes virent le jour en 1939, signés du pseudonyme de « commandant Verdun » [i.e. le commandant Lucien Souchon], publiés par les Editions Denoël. Le premier volume, préfacé par le général Weygand : La Guerre souterraine, parut en février 1939 ; le second : L'Escadron Cyclone, en mai 1939. Un troisième, resté inédit, était annoncé pour paraître en octobre 1939.

* Les Atrocités allemandes en Pologne par Antonina Silberstein qui signe Antonina Vallentin, publié en mars 1940 par Robert Denoël, 60 avenue de La Bourdonnais, dans une collection nouvelle : « La Guerre telle qu'elle est ».

* Une Finlandaise dans la tourmente par Maïre Inkinen-Jaroszynska, publié en décembre 1939 par Robert Denoël, 60 avenue de La Bourdonnais.

Tous ces titres appartiennent à ce que Denoël appelle son « activité de guerre », qu'il ne confond pas avec sa production habituelle : « Les deux volumes publiés avant la guerre et qui ont eu des prix littéraires, ne font pas à proprement parler partie de mon activité de guerre. »

Les volumes évoqués sont :

* La Rose de la Mer, un roman de Paul Vialar publié en novembre 1939 par Robert Denoël, 60 avenue de La Bourdonnais, couronné le 5 décembre 1939 par le prix Femina, et réimprimé peu après par les Editions Denoël.

* Les Javanais, un roman de Jean Malaquais publié en juin 1939 et qui obtint le prix Renaudot.

On voit que les livres et revues publiées par Robert Denoël en 1939 et 1940 ont subi de nombreux avatars. Rien d'étonnant à ce qu'il diversifie sa production et crée de nouvelles collections durant cette période troublée. Pourquoi n'a-t-il pas déclaré au Registre du commerce l'enseigne des Editions Documentaires ? La déclaration de guerre, la saisie de milliers de volumes et brochures rue Amélie en juin 1940, et la fermeture de sa maison, du 17 juin au 15 octobre 1940, lui ont sans doute fait oublier cette formalité.

Il existait au cours des années trente une maison d'édition située au 106 rue de Richelieu qui s'appelait « Editions Documentaires » : sans doute Denoël n'a-t-il pas voulu créer de confusion. Les couvertures des deux brochures parues portent donc « Editions Documentaires Nationales » (mais c'est bien « Editions Documentaires » qui figure sur leurs pages de titre).

 

* Percheron (Maurice). Gamelin, octobre 1939  [n° 933]

* Ageorges (Joseph). Le Cardinal Verdier, chef spirituel,  février 1940  [n° 934]

 

   

Elle dut être abandonnée en raison de la guerre mais, dans la lettre à sa femme citée plus haut, il écrivait : « dans deux ou trois jours, Roger Giron, chef des services de la presse à la Présidence du Conseil, me remettra le texte d'une étude sur M. Paul Reynaud, étude approuvée par le Président, cela va sans dire - qui paraîtra dans la collection les " Grandes Figures d'Aujourd'hui " ».

Ce troisième titre ne vit jamais le jour, pas plus que les monographies de Darlan, Gort et Vuillemin annoncées au dos de la brochure de Percheron.