Robert Denoël, éditeur

La Publicité Vivante

 

La plupart des grands éditeurs parisiens ont créé, au cours des années vingt et trente des « filiales » destinées à des opérations financières, telles que le rachat de fonds d'édition, ou le financement de journaux et revues.

L'exemple le plus connu est celui de la Société ZED, antenne active de Gallimard qui finança les magazines Détective en 1928, Voilà en 1931, Marianne en 1932, et qui racheta en 1951... les Editions Denoël.

Ces filiales disposent généralement de fonds importants que les maisons d'édition ne pourraient assumer sur le plan fiscal. On ne trouve rien de tel chez Denoël qui, pour racheter en 1934 le fonds des Editions des Cahiers Libres, utilise sa propre société.

Sa première « filiale » est constituée le 15 octobre 1937, dix mois après le départ de Bernard Steele, son unique bailleur de fonds, et il choisit de n'y apparaître qu'à raison de son concours, « tant dans la constitution que pour la marche des affaires de l’entreprise sociale », ce qui veut dire qu'il la finance et la dirige.

Achives commerciales de la France,  25 octobre 1937

Les trois associés qu'il a réunis sont :

* Robert Beauzemont, son voisin et ami qui tient une boutique de T.S.F., 21 rue Amélie, accolée à sa maison d'édition et qui est né à Paris le 6 avril 1906.

* Georges Wenstein, « directeur commercial », qui habite 66 avenue Victor Hugo, dans le XVIe arrondissement, et qui est né à Paris le 31 mars 1911.

* Guillaume Ritchie-Fallon, « propriétaire », habitant 4 square Jean-Thiebaud (XVe). C'est son prête-nom et son beau-frère, alors âgé de 21 ans et étudiant en médecine.

La Société appelée « La Publicité Vivante », dont le siège social est à l'adresse des Editions Denoël, 19 rue Amélie, a pour objet : « toutes opérations commerciales relatives à la publicité sous toutes ses formes ».

Son capital social est fixé à 25 000 francs, le montant minimal, qui est fourni en numéraire par les trois associés, à raison de :

* 8 000 francs par Robert Beauzemont

* 8 000 francs par Georges Wenstein

* 9 000 francs par Billy Fallon

Les 50 parts sociales de 500 F ont été réparties entre les associés, proportionnellement à leurs apports : Beauzemont (16 parts), Wenstein (16 parts), Fallon (18 parts). Les deux gérants sont Robert Beauzemont et Georges Wenstein.

La nouvelle société a été enregistrée le 18 octobre 1937 au greffe du Tribunal de commerce de la Seine sous la cote 275 126 B.

L'article XIX prévoit que, sur les bénéfices nets, 25 % seront prélevés en faveur de Robert Denoël :

[Acte passé le 15 octobre 1937 devant R. Fourcault-Pandonnière, 115 avenue des Champs-Elysées, et enregistré le 18 octobre 1937 au greffe du Tribunal de commerce de la Seine sous la cote n° 341]

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J'ignore à quoi a pu servir la Société « La Publicité Vivante » qui, six mois après sa constitution, annonce le départ d'un de ses trois actionnaires : le 1er mars 1938 Georges Wenstein cède ses 16 parts à Jeanne Valensi, une dame demeurant à Paris, rue du square Carpaux n° 7, au prix prévu aux statuts, soit 500 francs la part. Les actionnaires décident alors que la société n'aura plus qu'un seul gérant : Robert Beauzemont.

[Acte passé devant R. Fourcault-Pandonnière, 115 avenue des Champs-Elysées, enregistré le 10 mars 1938 au greffe du Tribunal de commerce de la Seine sous la cote n° 349]

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Le 16 décembre 1939 c'est au tour du gérant de la société de céder ses parts. Robert Beauzemont le fait à des conditions très particulières : ses 16 parts, qui représentaient 8 000 francs, sont revendues à Robert Denoël « au prix forfaitaire » de 2 000 francs, soit au quart de leur valeur.

Le même jour Denoël lui a revendu, aux mêmes conditions, 24 parts qu'il détenait dans une autre société qu'ils avaient constituée ensemble : « La Radio Vivante ». Il s'agit donc d'un jeu d'écritures, mais qui signifie que Beauzemont se retire définitivement des affaires de l'éditeur.

A cette date les 50 parts qui composent le capital social de la société sont ainsi réparties :

- à M. Robert Denoël : 16 parts
    - à Mlle Jeanne Valensi : 16 parts
    - à Billy Fallon : 18 parts


[Acte passé devant Georges Hagopian, 24 rue de Bondy à Paris 10e, enregistré le 9 janvier 1940 au greffe du Tribunal de commerce de la Seine sous la cote n° 46]

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Le 4 octobre 1940 Jeanne Valensi cède à Robert Denoël les 16 parts qu'elle détient dans la société pour la somme de 4.000 francs, soit à 50 % de leur valeur nominale.

[Acte passé devant Georges Hagopian, 24 rue de Bondy à Paris 10e, enregistré le 29 octobre 1940 au greffe du Tribunal de commerce de la Seine sous la cote n° 937]

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Le 20 novembre 1940 a lieu au 19 rue Amélie, une assemblée générale des membres de la s.a.r.l. La Publicité Vivante. En réalité Denoël est seul en compagnie de son agent d'affaires. Billy Fallon, qui est Anglais puisque né au Cap de père anglais, a quitté la France en juin 1940 pour rejoindre l'Angleterre. Denoël agit donc en son nom par procuration.

Après avoir rappelé les différentes cessions intervenues précédemment, la répartition des parts dans la société au capital inchangé de 25 000 francs, est la suivante :

- Robert Denoël : 32 parts de 500 F chacune, soit 16 000 francs

- Billy Fallon : 18 parts de 500 F chacune, soit 9 000 francs

Le sujet de cette assemblée est la modification du nom de la société qui, à cette date, devient : « Les Nouvelles Editions Françaises », dont Robert Denoël est nommé seul gérant.

[Acte passé devant Georges Hagopian, 24 rue de Bondy à Paris 10e, enregistré le 22 novembre 1940 au greffe du Tribunal de commerce de la Seine sous la cote n° 416]

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La suite des modifications administratives se trouve sur la page Les Nouvelles Editions Françaises.