Robert Denoël, éditeur

1980

 

Janvier

 

Le 20 : « Cécile Robert-Denoël est morte dimanche dernier 20 janvier à midi, à l’hôpital de la Fontonne à Antibes, munie des sacrements de l’Eglise. Son corps est enterré presqu’en pleine campagne, dans un très petit cimetière à flanc de colline ; elle a, comme elle le souhaitait, la tombe la plus simple qui soit. J’ai voulu que l’on n’y inscrive que ‘Cécile Robert Denoël, 1906-1980’ » [lettre d'Albert Morys, 25 janvier 1980].

 Cécile Brusson en 1936

Le 22 : Morys écrit dans son journal : « Cécile est repartie près de la Vierge Noire à laquelle sa Maman l'avait vouée lors de sa naissance. Il y a soixante-treize ans de cela ; soixante-treize ans et quatre mois. Mais qu'importent les années ! Son coeur était... son coeur est plus jeune et pur que celui de bien des enfants. Je dis bien «est» car pour moi, elle est et restera toujours vivante. Le corps qu'elle a quitté avant-hier ressemble à un mannequin de cire du Musée Grévin, parfait par la ressemblance mais d'où tous ces petits sillons, creusés par les années, donnent tant de vie à ce visage aimé, ont disparu comme par miracle. Ce corps n'est plus elle et, si ce n'était la peine des siens et ma terrible solitude, son âme sourirait certainement demain lorsque l'on descendra dans la terre cette «chose» qui l'a tant fait souffrir. »

Le 23 : Extrait du journal de Morys : « Le corps sans vie de ma femme bien-aimée devait être mis en terre ce matin. Mais décidément, rien ne sera jamais simple dans sa vie ni le début de l'autre. [...] Tout semblait normal jusqu'à hier après-midi lorsqu'un coup de téléphone de la maison Roblot nous fait savoir que l’on ne peut creuser : la roche s'y oppose. Pas question d'utiliser un marteau-piqueur ou la dynamite ! Robert (son fils) court à la mairie pour avoir immédiatement une autre concession ».

Le 24 : « C'est donc ce matin que le corps de ma femme bien-aimée est retourné en terre [...] en attendant la tombe aussi simple qu'elle le souhaitait. Usée par la souffrance physique depuis bien des années, par la souffrance morale aussi qu'elle ne méritait pas, Cécile Robert-Denoël, ma femme, a fini de souffrir en ce monde. Son corps est retourné à la terre, son esprit est auprès de nous et son âme a commencé un long cheminement dont nous ignorons le trajet », écrit Morys.