Robert Denoël, éditeur

Denoël dans la presse

1946

 

Le nom de Robert Denoël est presque absent de la presse durant cette année essentielle pour sa succession. Le 28 janvier, Cécile Denoël a déposé plainte contre Jeanne Loviton pour vol, escroquerie, abus de confiance, faux, usage de faux et abus de blanc seing.

Le mois suivant, le tribunal des référés ordonne la mise sous séquestre des parts de l'éditeur dans sa société, cédées en octobre 1945 à sa maîtresse. En mai, Cécile Denoël se constitue partie civile dans l'affaire du meurtre de son mari, obligeant le juge Gollety à ordonner un complément d'enquête. En novembre, la brigade criminelle clôture cette nouvelle enquête sans plus de résultat que la première.

En décembre, la chambre des Mises en accusation prononce un non-lieu dans l’affaire de la cession des parts de Robert Denoël aux Éditions Domat-Montchrestien, et une ordonnance de non-lieu est rendue dans l'affaire de l'assassinat de l'éditeur. L'affaire Denoël a-t-elle cessé de passionner la presse, ou bien le Parquet ne lui communique-t-il pas d'informations ?

 

12 avril

 

Article signé P.S. paru dans Le Populaire :

 

« L’éditeur Denoël a-t-il cédé ses parts ? »

Le 2 décembre, l’éditeur Robert Denoël était assassiné boulevard des Invalides. Faute d’éléments, on conclut au crime de rôdeurs.

Depuis, plus rien. Silence complet. Mais si, sur le plan criminel, l’affaire Denoël est au point mort, sur le plan civil, par contre, il y a du nouveau. Mme veuve Denoël et Mme Loviton, qui fut la maîtresse de l’éditeur, se livrent une bataille acharnée autour du testament. Et le juge des référés a été saisi.

Le différend porte sur une cession de parts que Denoël, le 25 octobre, aurait consentie à son amie Mme Loviton, gérante de la Société Domat-Montchrestien. Cette cession ne fut d’ailleurs enregistrée que le 8 décembre, six jours après l’assassinat.

Mme veuve Denoël, que cette opération ruine ainsi que son fils, soutient qu’elle constitue une manœuvre frauduleuse. Son mari, par ce moyen, aurait tenté de soustraire ses biens à une confiscation éventuelle, en raison de son activité suspecte pendant l’occupation.

Cette cession, déclare en outre Mme Denoël, aurait été réalisée par un blanc-seing complété par Mme Loviton après la mort de l’éditeur et non dans le sens que celui-ci entendait lui donner.

Mme Loviton, qui soutient le contraire, ne peut apporter la preuve du paiement. Le président des référés a ordonné la mise sous séquestre des parts. Bientôt, on plaidera le fonds.

P.S.

2 juin

 

Echo non signé paru dans Le Populaire :

 

« Le séquestre est maintenu sur les parts de l’éditeur Denoël »

A la requête de Mme Robert Denoël, veuve de l’éditeur assassiné dans la soirée du 2 décembre, boulevard des Invalides, dans des circonstances pour le moins troublantes, le président du tribunal civil avait prononcé le 22 février la mise sous séquestre de 1 515 parts de sa maison d’édition qu’il avait cédées à Mme Loviton, sa maîtresse.

Le 17 mai, Mme Loviton demandait à la première chambre de la Cour d’appel la levée du séquestre. Le jugement a été rendu hier. La première chambre a confirmé la décision du président du tribunal civil. Les parts resteront donc sous séquestre en attendant décision sur le fond.

 

Plusieurs journaux consacrent des articles commémoratifs à l'écrivain décédé à Sébastopol le 21 août 1936. Gaston Poulain a interviewé sa mère : « Mme Dabit me parle du film ' Hôtel du Nord ' " qui n'aurait pas fait plaisir à Eugène ", et du procès que, pendant l'occupation, elle et Béatrice Appia intentèrent à l'éditeur Robert Denoël. Celui-ci n'avait-il pas eu le front de céder sans leur autorisation les droits d'Hôtel du Nord à l'hebdomadaire Germinal qui en avait commencé la publication ? Le procès, heureusement, fut gagné par les Dabit, mais Mme Dabit en frémit encore... »  [La Dépêche de Paris, 5 septembre 1946].

 

24 septembre

 

Echo non signé paru dans Ici Paris :

« Bataille autour d’une succession »

L’éditeur Denoël fut, on s’en souvient, assassiné il y a quelques mois, un soir, au volant de sa voiture qu’une panne immobilisait.

Son amie, Mme Jeanne Lovitan [sic], avocate, qui se trouvait à ses côtés lors de la panne, l’avait quittée pour demander l’aide d’un garage [sic].

Une instruction est ouverte et n’a pu encore faire découvrir les assassins. Une seconde instruction vient de commencer à la demande de la veuve de l’éditeur, laquelle porte plainte contre Mme Jeanne Lovitan, qu’elle accuse d’avoir fait disparaître des parts du fondateur de la maison d’édition.

L’avocate, assistée de Me Rosenmark, se défend énergiquement, tandis que Mme Denoël, représentée par Me Rozelaar, accuse avec non moins d’énergie.

 

Franc-Tireur, 20 octobre 1946